3 au 9 décembre
Le BIEF a organisé la troisième édition du Fellowship d’éditeurs francophones de jeunesse et de bande dessinée en partenariat avec le Salon du livre de Montreuil, le CNL, l’Institut français et avec le soutien de l’Organisation internationale de la Francophonie. Retour sur ce dernier grand événement de l’année.
Depuis 2020, le BIEF invite des éditeurs francophones spécialisés en BD et en jeunesse à Paris dans le but d’établir des liens durables avec leurs homologues français et de renforcer le réseau entre éditeurs francophones.
Ainsi, huit éditeurs et éditrices venant d’Algérie, du Bénin, du Cameroun, du Canada, du Gabon, du Liban, de Madagascar et de Tunisie ont pu visiter le Salon du livre de Montreuil, y montrer leurs livres et assister à une journée professionnelle comprenant notamment un atelier sur les partenariats éditoriaux animé par l'Alliance internationale des éditeurs indépendants. Deux tables rondes ont été consacrées au dynamisme du documentaire dans l’édition jeunesse et bande dessinée (en histoire, en science ou tout sujet sociétal touchant les enfants) et à l’édition inclusive, plus spécifiquement l’édition adaptée aux troubles DYS qui, à la lumière des neurosciences mais aussi des difficultés reconnues des enfants dans l’apprentissage de la lecture, se développe de manière générale dans les romans et les albums.
Des rencontres avec des libraires francophones et des rendez-vous B to B avec les éditeurs français étaient également organisées. La variété des visites et des sujets a enthousiasmé les fellows, de même que la présentation des lignes éditoriales par les éditeurs français eux-mêmes, une manière selon Véronique Fontaine, fondatrice des éditions québécoises Fonfon, de réfléchir à leur propre pratique.
Les rendez-vous B to B entre éditeurs français et francophones
Les échanges favorisent une meilleure compréhension des marchés du livre francophones, et ont contribué, pour certains, à ouvrir la voie à des coéditions, comme en témoigne Joanna El Mir, directrice du pôle jeunesse chez Samir éditeur à Beyrouth, dont les livres, en arabe et en français, sont distribués en France.
"Avec la crise économique au Liban, les coéditions nous intéressent beaucoup afin de réduire les coûts. Nous suivons les tendances sur le marché français, nous savons que la jeunesse est un secteur très dynamique, mais nous ne connaissons pas ‘les coulisses’ et les éditeurs français qui sont derrière. Le programme permet de créer des contacts en vue de possibles partenariats éditoriaux, également entre éditeurs francophones. J’ai senti beaucoup d’ouverture et de curiosité, mais il s’agit d’un processus long." Découvrir les aides des institutions telles celles de l’Institut français ou du CNL a également "ouvert des horizons" aux éditeurs francophones qui ignorent parfois que ce soutien s’adresse également à eux.
Bouger les lignes
De son côté, Alexandra Bentz, directrice générale adjointe d’Édi8 qui vient de lancer une maison d’édition en Côte d’Ivoire et une au Sénégal, a assisté aux rencontres pour apprendre davantage sur les marchés africains. "Nous sommes focalisés sur l’Afrique de l’Ouest en ce moment, c’était donc très intéressant de découvrir comment sont structurées l’édition et la librairie au Bénin, au Cameroun, en Tunisie ou au Liban. J’ai beaucoup appris sur le positionnement de chaque pays. Nous aimerions beaucoup initier des collaborations afin que les livres transitent entre les pays sans forcément passer par la France."
Pour Christophe Tonon, fondateur des éditions Christon au Bénin, le programme a justement permis de "poser les bases d'une belle future collaboration" et de mieux se repérer dans l’immense offre en jeunesse dans les pays francophones et en France : "Je sors de ce Fellowship avec des idées et des ressources nouvelles qui me permettront de faire bouger véritablement les lignes et d’apporter de la nouveauté sur mon marché." L’édition française va certainement gagner en nouveaux lecteurs dans les pays d’origine des fellows car tous sont prêts à acheter les droits en français, avec adaptation ou non du contenu à leur lectorat. Et ils rendront accessibles ces livres dans leurs pays, non seulement par un prix adapté, mais aussi par une diffusion nationale ou dans des pays proches où ils connaissent bien leurs homologues. Les éditeurs d’Afrique francophone savent aussi qu’aujourd’hui leurs lecteurs souhaitent lire en langues locales : on en compte pas moins de 270 au Cameroun, par exemple, et deux langues officielles coexistent (français et anglais).
Un contrat a déjà été signé entre fellows durant le programme par les maisons d’édition Jeunes Malgaches (Madagascar) et Thanks (Cameroun). De nouvelles perspectives d’échanges de droits dans un marché jeunesse et bande dessinée francophone encore "jeune" mais plein de vitalité !
Stéphanie Suchecki et Katja Petrovic