Comment la psychanalyse a-t-elle acquis sa place
centrale et quasi incontestée ? Comment a-t-elle
fait pour éliminer les théories et thérapies rivales ?
Pourquoi trouvons-nous tout naturel de comparer
Freud à Copernic et à Darwin, ainsi qu'il le faisait lui-même
? Ce n'est pas parce que la psychanalyse aurait
démontré sa supériorité. Sur la base de recherches
effectuées dans les archives du mouvement freudien
et d'une reconstitution des controverses qui aboutirent
à la création de celui-ci, les auteurs établissent
que les prétentions de la psychanalyse reposent en
fait sur une réécriture tendancieuse de l'histoire et
des données cliniques, et non sur un consensus des
chercheurs. Depuis le mythe de l'«auto-analyse»
de Freud jusqu'aux fausses rumeurs lancées par
celui-ci au sujet de la patiente «Anna O.» ou de ses
ex-disciples, en passant par la manipulation narrative
des histoires de cas, la déformation intéressée
de l'épisode de la «théorie de la séduction» ou
l'ahurissante censure des lettres à Fliess et d'autres
documents gênants, c'est toute la psychanalyse
qui s'avère matière légendaire, construction interprétative,
interpréfaction.