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Que se passe-t-il dans le monde du livre à l’étranger ?

janvier 2024

En ce début d’année, le BIEF jette un œil sur l’actualité du livre dans le monde. Sans surprise, le nouveau président argentin envisage des coupes dans ce secteur. En Allemagne le marché perd l’un de ses acteurs historiques avec l’arrêt définitif du Buchreport et comme dans de nombreux pays, les conditions des traducteurs littéraires se précarisent aux États-Unis.


En cette période de crise, le secteur du livre n’est pas épargné. Ainsi, le gouvernement ultralibéral et populiste de droite de Javier Milei vise à déstabiliser le secteur de l’édition en Argentine en mettant fin au prix unique du livre, s’alarme la plateforme Publishnews.es : 


"La Fundación El Libro, organisatrice de la Foire du livre de Buenos Aires, a exprimé fin décembre, son 'rejet total et absolu' des projets de changements dans le secteur de la culture et du livre, présentés par le nouveau gouvernement argentin. Parmi ses projets, l’abrogation de la loi sur le prix unique du livre [fixé depuis 2002 par l’éditeur avec la possibilité d’une remise allant jusqu’à 10 % lors des ventes réalisées durant les foires du livre]. 'Cette loi (…) protège la bibliodiversité. Son abrogation entraînerait l'effondrement de toute la chaîne du livre et risque de détruire l'équilibre entre les librairies indépendantes et les grandes surfaces.' Au-delà de cette mesure, le gouvernement Milei veut ‘faire disparaître deux institutions culturelles phares de notre pays : le Fonds national des arts et l'Institut national du théâtre, contribuant ainsi à la destruction du tissu culturel argentin, tant admiré dans le monde entier'", s’indigne encore la plateforme. 


Publishnews.es, Madrid, 28 décembre 2023


Mauvaise nouvelle également pour le Buchreport en Allemagne. L’équivalent de Livres hebdo, créé en 1970 à Dortmund et dédié à l’actualité du livre dans l’espace germanophone, a dû cesser son activité en début d’année, comme le déplore la rédaction dans sa dernière édition : 


"Le Buchreport ne vous fournira donc plus de nouvelles, d'analyses et de statistiques, de listes de best-sellers et de bonnes pratiques, ni de regards sur d'autres marchés du livre et les évolutions générales qui influencent ce secteur si particulier. Peut-être que l'une ou l'autre de ces informations vous manquera ? (…) Nous avons toujours apprécié le travail très varié que nous avons effectué pour les nombreuses personnes engagées dans le domaine du livre et les différentes entreprises du secteur. La rédaction remercie tout particulièrement ses nombreux interlocuteurs pour leur confiance et leur patience, même lors de recherches obstinées et des questions critiques."


Buchreport, Dortmund, 3 janvier 2024


Selon une étude récente menée aux États-Unis, les traducteurs littéraires américains ont connu une dégradation de leurs conditions de travail par rapport à il y a 5 ans. Ainsi, en 2022, seuls 11,5 % des répondants ont déclaré pouvoir vivre de cette activité sans avoir un autre travail en parallèle, rapporte le Publishers Weekly : 

 

"Un peu moins de 300 traducteurs résidant aux États-Unis ont répondu à cette enquête menée en ligne en octobre 2022 afin de recueillir des données sur les droits d'auteur, la rémunération, les à-valoir et d'autres questions liées au travail des traducteurs littéraires. Voici un aperçu des principales conclusions de cette étude : les répondants sont très majoritairement blancs (80,6 %), bien que le nombre de traducteurs noirs/africains américains ait doublé par rapport à l'enquête de 2017 avec aujourd’hui 3,2 %. 74 % des personnes interrogées occupent un autre emploi en plus de leur travail de traducteur et 63,5 % ont déclaré un revenu annuel inférieur à 10 000 dollars provenant de la traduction littéraire. Bien que le coût de la vie aux États-Unis ait augmenté de 20 % depuis 2017, le tarif moyen de traduction par mot n'a augmenté que de 8 %. Environ 73 % des sondés ont conservé des droits d'auteur sur leur travail et 58 % des traducteurs de fiction ont déclaré que leur nom apparaissait 'toujours ou habituellement' sur la couverture."


Publishers Weekly, New York, 8 janvier 2024


Également aux États-Unis, une bonne nouvelle est annoncée sur le site de Publishing Perspectives : la Cour américaine a bloqué la loi dite "de l'Iowa" visant à interdire des livres scolaires contenant des représentations d'actes sexuels ou traitant des questions de genre et de l’orientation sexuelle, explique le journal : 


"Promulguée le 26 mai par le gouverneur de l'Iowa, la loi devait entrer en vigueur le 1er janvier 2024 mais Penguin Random House, l'Iowa State Education Association, les auteurs Laurie Halse Anderson, John Green, Malinda Lo et Jodi Picoult, ainsi qu'un lycéen de l'Iowa ont porté plainte et la Cour a finalement tranché en leur faveur – une décision qui réjouit les défenseurs de la liberté d’expression et de la lecture. Selon Dan Novack, vice-président de Penguin Random House, il s'agit d'une avancée majeure : 'Tous les points de vue et toutes les perspectives doivent être équitablement mis à la disposition des lecteurs. Penguin Random House continuera à soutenir nos auteurs, leurs récits et leurs idées, ainsi que les étudiants et les éducateurs qui ont le droit d'accéder aux livres et d'en discuter sans aucune influence gouvernementale.'"


Publishing Perspectives, New York, 2 janvier 2024


En Italie, le secteur du livre commence à s’intéresser à Threads, le nouveau réseau social de Meta fraîchement débarqué en Europe. Après son lancement aux États-Unis, au Canada, au Royaume-Uni, en Australie, en Nouvelle-Zélande et au Japon, Threads est arrivé en l’Italie et Il Giornale della libreria se demande si le monde de l’édition pourrait en profiter : 


"Appartenant à Meta, Threads est un réseau social de microblogging dont les mesages sont actuellement limités à 500 caractères avec la possibilité d'ajouter des liens, des photos et des vidéos. [Présenté comme un clone de Twitter], l'inscription est très simple et les utilisateurs peuvent se connecter avec leur profil Instagram en conservant ainsi leurs followers et leurs contacts. Mais comment le monde de l'édition s'est-il approprié cette nouvelle plateforme ? Penguin Random House et Penguin Books ont commencé à l’utiliser pour mobiliser et renforcer la communauté des lecteurs, en y lançant des sondages et des discussions souvent humoristiques et ludiques. La plateforme Goodreads, dédiée aux recommandations de livres a fait de même, arrivant ainsi à augmenter l’engagement de ses followers : le ton amical et confidentiel génère beaucoup de réponses et de partages de la part de la communauté, créant ainsi une relation personnelle et directe. En Italie, NN Editore, la librairie milanaise Verso et le booktuber Tegamini (200 000 followers sur Instagram) ont également eu de bonnes expériences avec Threads. Mais, comme il s'agit d'une nouvelle plateforme, il faudra du temps pour comprendre si elle s'avérera être un canal de communication efficace dans le secteur de l'édition, ou si elle sera vite abandonnée comme cela a été le cas avec d'autres réseaux sociaux", conclut le journal.


Il Giornale della libreria, Rome, 22 décembre 2023 




Katja Petrovic