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Compte rendu

Séminaire franco-allemand sur le beau-livre

juillet 2010

[17-18 juin 2010]
Les rencontres franco-allemandes de Berlin avaient pour ambition de conforter les échanges entre éditeurs de beaux livres et de faire le bilan sur les problématiques qui intéressent aujourd’hui ces professionnels de part et d’autre du Rhin. Des deux thématiques éditoriales sélectionnées, celle du livre d’art a été plus largement traitée que celle de l’art de vivre.

Les rencontres franco-allemandes de Berlin avaient pour ambition de conforter les échanges entre éditeurs de beaux livres et de faire le bilan sur les problématiques qui intéressent aujourd’hui ces professionnels de part et d’autre du Rhin. Des deux thématiques éditoriales sélectionnées, celle du livre d’art a été plus largement traitée que celle de l’art de vivre.
 
Quatre tables rondes animées par des intervenants français et allemands et modérées par deux journalistes – Anne-Laure Walter de Livres Hebdo et Sabine Cronau du Börsenblatt ont structuré la première journée.

Les nouvelles approches marketing et les modèles économiques des beaux livres
Intervenants : Arnaud Bizalion (Images en Manœuvres) et Dr. Cristina Steingräber (Hatje Cantz)
Arnaud Bizalion a d’abord présenté une déconvenue éditoriale qui nous a fait toucher du doigt la question du format du livre et de son prix. L’expérience lui a appris qu’un petit format se devait d’être commercialisé à un petit prix (dans ce cas fixé à 25 €) et que son référencement en librairie, de par sa taille, n’était pas optimal. Expérience confirmée par l’éditeur Bernard Chauveau, qui se pose actuellement des questions sur la pérennité de sa collection « Les Cahiers ».
Ces remarques furent le point de départ de réflexions plus générales sur le prix du livre d’art. Dans les deux pays, les petits prix (15-20 €) connaissent un succès commercial auprès du grand public. Il en est de même avec les ouvrages de très haute qualité à un prix élevé. La difficulté porte sur ceux dont le prix oscille entre 25 € et 50 € et la cible, entre le grand public et l’amateur. Il est donc primordial, pour établir le « bon prix » d’un ouvrage, de connaître le profil de ses acheteurs et de produire une publication en conséquence.
 
L’intervention de Cristina Steingräber nous a donné à réfléchir sur la promotion. En complément d’un journal trimestriel, la maison d’édition a développé un site internet kq-daily.de, qui informe sur l’actualité artistique en Allemagne et à l’étranger. Ce site permet à l’éditeur d’être au cœur d’un réseau de professionnels et d’amateurs. La stratégie marketing de la maison repose sur un positionnement fort de prescripteurs d’art, d’« experts » en catalogues d’exposition, et sur un travail étroit avec ses partenaires. Ainsi, les libraires sont-ils invités fréquemment aux vernissages et destinataires réguliers de matériel d’information.


Les co-productions et les échanges de droits dans le domaine du livre illustré
Intervenants : Jana Navratil-Manent (Flammarion) et Jürgen Krieger (Prestel)
Après sept ans d’une expérience de publication en langue allemande, Flammarion a récemment décidé de revenir au schéma classique de la coédition. En effet, passant du statut de partenaire à celui de concurrent des éditeurs allemands, le succès sur le territoire germanophone a été mitigé. Si la production en anglais réussit à nombre d’éditeurs, le succès est plus incertain pour les autres langues, dont le marché est plus restreint et les acteurs moins nombreux.
Jürgen Krieger, quant à lui, a fait un appel à la simplification des contrats et mentionné le cas des musées américains qui achètent les droits pour l’exposition et son catalogue. En outre, il a présenté un site internet destiné à simplifier l’obtention de l’information sur les droits de reproduction numériques des œuvres de 30 000 artistes internationaux. www.onlineart.info regroupe les organismes nationaux de gestion des droits de reproduction de 11 pays européens et propose un lien direct vers leurs homologues américains et australiens.

Le livre d’art en librairie et les librairies de musée
Intervenants :
Marc Bédarida (éditions de la Villette) et Thomas Emig (Wasmuth Buchhandlung)
La présence du livre d’art français en librairie allemande est très modeste. Elle est principalement assurée par 5 spécialistes : Walter König, Sautter & Lackmann, Limacher, Bücherbogen et Wasmuth. La plupart des librairies généralistes s’approvisionnent auprès de grossistes, de librairies partenaires, ou du CELF. Thomas Emig a précisé que la fermeture de celui-ci avait fortement endommagé la diffusion du livre français en Allemagne. D’une façon générale, les livres en français se limitent aux titres qui sont directement liés à des musées, c’est-à-dire aux guides ou aux catalogues d’exposition. à la lumière de la discussion, deux différences entre la France et l’Allemagne sont apparues : les ventes par Internet qui sont plus conséquentes en Allemagne (environ 30%) qu’en France (10-15%), et les remises accordées aux libraires, elles aussi plus importantes en Allemagne (40 à 45%).

Les catalogues d’exposition et les projets à l’international
Intervenants :
Hélène Clastres (Gallimard Loisirs) et Thomas Zuhr (Hirmer Verlag)
Alors que les éditeurs privés français voient plutôt d’un bon œil les collaborations avec les musées, les éditeurs allemands ont clairement signifié quelques réserves. Que ce soit Hatje Cantz ou Hirmer, dont la majorité de la production se compose de catalogues d’exposition, ou Jovis Verlag, qui est moins coutumier du fait, tous ont mis en garde leurs collègues, reprochant à certains musées de ne pas assez accompagner la vente de l’ouvrage, ou d’imposer des conditions peu favorables (en termes de quantité d’impressions et de prise de risque commerciale, de délais de production ou de liberté éditoriale). Cristina Steingräber a suggéré une action collective afin d’améliorer les conditions de collaboration avec les musées. Côté français, le facteur prix comme critère majeur de choix lors des appels d’offre s’avère être le principal écueil.

Jean-Guy Boin a conclu cette journée en encourageant les coopérations franco-allemandes et a rappelé leur importance pour faire face à la concurrence anglo-saxonne et américaine surtout dans les pays émergents. Cette journée de débat s’est poursuivie le lendemain par une série de rendez-vous individuels et par la visite de librairies (Bücherbogen et Zadig Buchhandlung). Ce type d’opération dans son format ramassé et son contenu détaillé permet de redynamiser les liens éditoriaux entre Paris et Berlin.

Laurence Risson

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