«Quel champ de bataille nous laissons là aux Carthaginois
et aux Romains !» s'exclame Pyrrhos au moment de
quitter l'Italie en 275 av. J.-C. Effectivement, la Méditerranée
occidentale est le centre de l'affrontement décliné en trois
actes entre Carthage et Rome. Mais les guerres puniques
apparaissent surtout comme l'aboutissement logique des deux
siècles qui voient s'affirmer la prééminence de deux grandes
puissances, au détriment des forces grecques déclinantes.
Carthage est très tôt menacée par des prétentions d'ordre
impérialiste, qu'elles émanent d'Athènes ou d'Alexandre
le Grand. Dès le IVe siècle av. J.-C., la cité africaine accélère
sa politique de profondes réformes pour y faire face.
La métropole, solidement adossée à l'héritage phénicien,
va pourtant puiser du monde grec les outils nécessaires à
sa mue. Il était temps. Au siècle suivant, la coexistence qui
prévaut jusqu'alors entre Carthage et Rome ne résiste pas
au glissement des conquêtes romaines vers le sud de
l'Italie et à l'enjeu sicilien. Le danger ouvre la voie à un
rapprochement avec la sphère grecque. Et c'est aux
Barcides, Amilcar puis Hannibal, qu'échoit la tentative de
convertir l'aide logistique grecque en une véritable alliance
politique et militaire contre l'Urbs.
Par leurs engagements spectaculaires, notamment les
batailles de Cannes et Zama, l'étendue de leurs théâtres
d'opérations, les innovations militaires, l'envergure de
leurs principaux protagonistes et leurs conséquences durables,
les guerres puniques marquent un tournant dans
l'histoire antique du pourtour méditerranéen. En les réinsérant
dans l'histoire de la cité du IVe au IIe siècle av. J.-C., Khaled
Melliti donne à comprendre la vitalité comme les errements
d'une puissance unique et fascinante.