Partir, c'est s'arracher aux siens, se couper d'eux, les
trahir. Revenir, c'est s'exposer au risque de ne pas retrouver,
ne pas reconnaître. Le livre se situe dans la tension de
cette impossible équation. Travailler, comme la famille, les
Italiens, partis en Australie ou en France, chassés par le fascisme,
la misère. La narratrice part en Europe, en Algérie,
départs liés à la nécessité, débordant d'inconnu et de nostalgie,
du grec nostos, le retour et algos, la douleur. Ce sont des
départs où, depuis toujours, on emmène les siens sur son dos,
comme Enée fuyant Troie en flammes, chargé de son père,
Anchise, sur les épaules. La narratrice emporte avec elle ses
parents, ses camarades d'école, les ouvriers des petites villes,
les usines au bord de la rivière.
L'auteure a mené l'enquête dans sa propre famille. Le récit
enchaîne des personnages en autant de situations de migrations
différentes au sein du même noyau familial. Il restitue
ainsi les effets liés à cette dislocation, comme les éléments
d'une culture que le récit nous rend à la fois proche et actuelle.