«Je ne le reconnais pas, masqué par son
sac à dos. C'est lui, le plus attendu, mon
demi.
Il m'entraîne aussitôt, tout en esquivant
ma tentative d'embrassade.
Je n'ai pas le droit de te prendre dans mes
bras pour te dire ma joie de te voir vivant ?
Inutile qu'on nous voie davantage ensemble.
Le gérant du camping, c'est déjà beaucoup.
Alban pose son sac à dos au pied d'un
frêne, regard circulaire, ses bras se posent
sur mes épaules, les attirent vers lui, deux
baisers sonores sur chaque joue, comme les
jours où je réussissais un examen, et il me
tient serrée, comme il ne l'a jamais fait.
Je m'étais préparée à tout, depuis ce matin,
à sa mort, à son indifférence, pas à sa tendresse.
Mon cerveau s'efface de moi, vide
d'intentions et de questions. Seuls mes
bras vivent encore et entourent la taille
d'Alban et l'écrasent et l'étouffent. Les
doigts de mon demi quittent mes omoplates
pour aller desserrer mes mains.
Tu me coupes la respiration, grande soeur.
Je ne suis pas venu ici pour mourir.»
Quand elle apprend que son demi-frère
s'est converti à l'islam, Alix va tout faire
pour montrer à leurs parents, à la DCRI,
au monde entier et à son «demi» lui-même,
qu'il s'agit là d'un malentendu à
l'échelle de la planète généré par une
société qui multiplie les contresens et a
sacrifié tous ses repères.