«Il y eut à Metz un concert avec, en soliste
invité, Isaac Stern. J'étais fou de joie,
j'éprouvais une admiration sans bornes
pour lui. À la fin du concert, alors que des
dizaines de gens venaient le féliciter, je
le tirai littéralement par la queue-de-pie,
il ne prêta pas beaucoup attention à moi.
"Que veux-tu, garçon ?" dit-il quand même
dans son sublime français teinté de russe,
d'anglais et de yiddish, le chef local lui
fit savoir : "Oui, il est jeune, mais il joue
déjà bien du violon, vous savez."
"Maître, pourrais-je un jour vous jouer
quelque chose ? Je voudrais tant vous jouer
quelque chose."
Après une hésitation :
"Donne-moi ton numéro de téléphone -
on verra."
Je pensais que c'était fini, et qu'il n'avait
aucune intention de m'appeler. Quelques
jours plus tard, nous étions à table à Metz
pour le déjeuner familial. Le téléphone
sonne. "Allô, c'est Isaac Stern." Si on
m'avait dit que Dieu venait de téléphoner, je
n'aurais pas trouvé cela plus incroyable.»