L'architecture nourrit son art de failles et de saignées ouvertes dans le corps de la ville.
D'éphémères chantiers en dévoilent les entrailles, couches sédimentaires, traces de vie
passées et d'événements successifs, signes proliférant d'une transformation infinie.
En apparence figé dans un immuable présent, cet organisme n'est pourtant
qu'évolution foisonnante. La destruction s'y révèle un préalable à la reconstruction
d'un autre décor.
La modulation de standards se substitue à la spontanéité vernaculaire, donnant
l'impression d'une mutation perpétuelle de la diversité en unicité. L'empilement de
cubes ou l'expansion de boîtes dissimule sous une innocence ludique la disparition d'un
monde au profit d'un environnement.
Cet univers livré à l'entropie, où aucune harmonie, préétablie ou non, ne semble
possible, l'oeuvre photographique de Stéphane Couturier l'explore depuis plus de dix ans.
La monumentalité des formats vient faire écho à celle d'espaces et de bâtiments
interchangeables. Sa fondation est le doute. Doute sur l'emplacement, mais doute aussi
sur la réalité des objets photographiés. Le système de formes constitué à partir du
répertoire offert par la ville est en effet voisin de celui du trucage : découpe, collage,
rythmes musicalement mesurés. Pourtant aucune intervention préalable à la prise de
vue n'est accomplie sur le site, aucune manipulation n'est produite après la prise de vue.