Au lendemain de la perestroïka bulgare, trois garçons d'à peine plus
de vingt ans grimpent dans un bus à destination de Paris pour y voler
des voitures.
Lucky, Marco et la Perche ont des rêves différents, mais tous trois ont
décidé de changer de destin. Derrière eux : une petite ville sur la mer
Noire, autrefois en vogue parmi les «pays frères». Rongée par
l'attente, elle devient une banlieue de l'Europe. Devant, il y a la France,
qu'ils imaginent comme dans les films de Louis de Funès : riante,
proprette, un peu niaise. Mais avec les squats, la salle d'attente de
l'OFPRA, les grands magasins et leurs vigiles, ce n'est pas seulement
Paris qu'ils découvrent, c'est aussi et surtout leur condition
d'étrangers.
«De toute façon, quand tu parles mal la langue d'un pays, les gens ont
toujours tendance à te prendre pour un con.»
Serrures, fausses clés, alarmes, plaques minéralogiques : le vol de
voitures est présenté comme un artisanat, le rythme en plus. Savov
mène son récit tambour battant.
Après l'euphorie, après quelques revers aussi, une question revient,
lancinante : à quoi bon ? À quoi bon accumuler encore si l'on se
condamne à vivre seul ? Les gars de la bande se répètent sans cesse :
«Pas de femme à bord !» Mais Lucky ne veut plus d'une barque
incapable de chavirer. Il sent, lui, qu'il a le coeur tout palpitant d'amour.
Et il aura l'héroïsme du voyou qui choisit les fleurs - et l'écriture.