Les «libertins» du XVIIe siècle ont été injustement
oubliés, ou sous-estimés, par l'histoire officielle de la philosophie
française, ainsi que par sa tradition universitaire.
Cet oubli est regrettable, tant il s'agit là d'un art de penser
original et radicalement accordé à notre époque.
En vérité, ces «libertins» - étymologiquement, libertinus
désignait dans la Rome antique l'esclave libéré par
son maître - ne forment pas une véritable école, et ne
proposent aucun système. Leur pensée doit plutôt se
comprendre comme attitude, style ou règle de vie
concrète. Ses champions recherchent d'abord une forme
de sérénité, de quiétude, de plénitude. S'il n'existe pas
de «philosophie libertine» à proprement parler, on
trouve une «sagesse libertine» commune à plusieurs
grandes figures du XVIIe siècle : François de La Mothe Le
Vayer, Pierre Charron, Pierre Gassendi, Gabriel Naudé,
Jacques Vallée Des Barreaux, Cyrano de Bergerac, Saint-Evremond...
Ces penseurs ont incarné le moment périlleux de l'histoire
des idées où l'individu se réapproprie sa vie, ses
biens, son indépendance, son corps, et passe de l'exploitation
à l'autonomie. Manger, se déplacer, lire, faire
l'amour, méditer sans contraintes ni chaînes - telle est
leur ambition.
Christophe Girerd ressuscite l'esprit de ces philosophes
méconnus avec une singularité d'écriture qui permet
de retrouver la force et le grand air d'une «sagesse libertine»
plus indispensable que jamais.