Jean-Paul Marcheschi, me disait-on, c'est le feu. Homme de feu, je ne sais, mais homme du feu. Je l'imaginais, du coup, tel un de ces dieux ou Titans de la mythologie attelés à quelque épuisante forgerie, enfermé dans une grotte illuminée par instants de rougeoiements et d'étincelles. Et rentrant de cet affreux labeur éreinté et noirci. Peut-être revient-il en cet état, certains jours, de son atelier de la rue des Bourdonnais. Mais l'être est lumineux. D'une culture et d'une délicatesse qui ne sentent pas leur Héphaïstos (Héphaïstos dont Homère dit qu'il est (...) [amphiguhéeïs], ce qui veut dire «muni de deux bras robustes», mais peut vouloir dire aussi «boiteux des deux jambes»).
Non. Voici comment Marcheschi s'y prend avec le feu. Fourrant dans un porte-flambeau deux ou trois cierges qui, à peine allumés et brandis, commencent leur dégoulinement de cire. Et écrivant avec ces dégoulinements sur des étendues de papier, lançant, comme il dit pollockiennement, ses drippings de feu.
(...) Le voici entrant dans l'illustre cohorte des artistes contemporains à qui l'on confie la décoration d'une chapelle: Matisse, Cocteau, Soulages... À lui celle de Riom, jadis consacrée à saint Joseph et aux missionnaires de la Société de Marie. Qu'a-t-il voulu en faire? Il l'explique lui-même plus loin, sur l'exemple particulier du dernier de ses trois grands panneaux. Peu d'artistes parlent aussi bien de ce qu'ils font. Marcheschi porte en lui-même son méta-Marcheschi. C'est pourquoi cette préface est inutile. (...)
Dominique Noguez