«Dois-je avouer que, soudain, j'en ai eu
assez de me cacher publiquement en écrivant
des romans de bon garçon ? Que mes petites
épopées sur l'extase conjugale m'ont paru, la
quarantaine venue, bien pâlichonnes au
regard des folies de ma famille ? Bon sang,
me suis-je dit : jusqu'à quand auras-tu peur
d'être un Jardin ? Il faut admettre que le sang
des Jardin est un breuvage à hauts risques.
Une gorgée, et bas les masques ! Cap sur les
sentiments incorrects ; sur des fièvres
bizarres, loufoques, grisantes ; sur ces hurluberlus
qui font ma tribu et qui embellirent leur
vie de magnifiques audaces...
Le résultat est là : dans ce roman vrai, je
perce mes abcès de silence. Je vagabonde
enfin au sein de ce clan qui, à lui seul, incarne
la fantaisie, l'irrégularité en tout et un
moment d'incroyable liberté. Pour la première
fois, je redeviens un Jardin. Suis-je digne
de ces grands fouleurs de principes ? Je leur
dois, en tout cas, la meilleure part de ce que je
suis.»