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Compte rendu

Questions à Stéphanie Vernet, de retour de la Foire du livre jeunesse de Bologne

avril 2017


Stéphanie Vernet représente à Bologne plusieurs éditeurs français dont elle vend les droits étrangers : L'Agrume, Benjamins Media, Cambourakis, Dada, Graine 2, Magnani, Maison Georges.

 

La Foire de Bologne a annoncé la création d’une nouvelle foire à New York l’année prochaine, dédiée aux échanges de droits notamment avec les éditeurs et agents américains. Qu’en pensez-vous ?

Cela me semble en effet une très bonne initiative - une excellente occasion de rencontrer davantage d'éditeurs américains qui ne se déplacent pas tous à Bologne.

 

Est-ce toujours si difficile de vendre des droits en jeunesse aux Anglo-saxons ?

Dans le domaine de l'album jeunesse, c'est à mon sens aujourd'hui plus facile qu'il y a quelques années. Les éditeurs anglais comme américains s'intéressent de plus en plus à la création étrangère, et à ce qui se fait en France. Il arrive aujourd'hui qu'un titre soit cédé en langue anglaise avant d'être cédé dans d'autres langues, ce qui n'arrivait que très rarement auparavant. Les albums français bénéficient d'une réelle reconnaissance à l'international ; il est par contre sans doute beaucoup plus difficile de céder des romans jeunesse aux Anglo-saxons.

 

La vente de droits représente une part non négligeable du chiffre d’affaires de l’édition jeunesse et la concurrence entre éditeurs internationaux est grande. Que faites-vous pour attirer l’attention des éditeurs étrangers ?

En tant qu'agent, il est important pour moi d'avoir un catalogue très cohérent et de présenter des livres de qualité, intelligents, surprenants, les plus audacieux et les moins mass market possible. C'est la condition sine qua non pour pouvoir attirer l'attention des éditeurs étrangers. Ensuite, il y a un travail régulier d'envoi de catalogues, de newsletters, de présentation des titres, etc. Les cessions de droits à l'étranger, les prix internationaux, les articles de presse, tout ce qui témoigne de la reconnaissance du milieu est aussi très précieux pour séduire les éditeurs étrangers.

 

Que cherchent les éditeurs étrangers ? Notamment chez les Français ? Quelle production se vend le mieux ?
Les éditeurs étrangers cherchent leur coup de cœur : de beaux albums, de belles histoires. Les chiffres de vente dans le domaine de l'album ont une incidence assez faible sur les cessions de droits à l'étranger. Il faut que le livre sorte du lot, que ce soit par la qualité du texte et de l'illustration, et/ou par son concept original et sa fabrication soignée. Le documentaire et les séries, qui étaient plébiscités par beaucoup d'éditeurs en Asie il y a quelques années ont moins le vent en poupe. 

Chez l'Agrume, La Mégalopole a été traduit dans une dizaine de langues, par Thames and Hudson par exemple en Angleterre et aux États-Unis. L'Orchestre va être publié dans 11 langues, par Wide Eyed en Angleterre et aux États-Unis, par Gallucci en Italie, mais aussi en suédois, en catalan et en espagnol, en chinois simplifié, complexe, en coréen... Aux éditions Maison Georges, Rien du tout, un album de Julien Billaudeau, a fait l'objet de nombreux contrats suite à Bologne 2016.

Cette année, Un grand jardin de Gilles Clément et Vincent Gravé publié par Cambourakis et qui a remporté le prix "Books & Seeds" des Bologna Ragazzi Award 2017 a particulièrement plu, ainsi que Blanc, de Margaux Othats aux éditions Magnani, entre autres... Mais il est encore un peu tôt pour savoir quels intérêts vont se confirmer après la foire.

 

Comment expliquez-vous le succès des livres édités par l’Agrume qui reçoivent régulièrement des mentions à Bologne, comme par exemple Les Farceurs d’Anne-Hélène Dubray cette année dans la catégorie prix Première Œuvre ?

Chaque livre publié par l'Agrume est particulièrement pensé et soigné, aussi bien dans son contenu que dans sa forme. La maison d'édition n'hésite pas à publier des titres coûteux et complexes à fabriquer, audacieux, qui témoignent d'une capacité à prendre des risques par conviction éditoriale. Si certaines fabrications sont spectaculaires en effet, cela n'est jamais gratuit et c'est ce qui est apprécié par les éditeurs étrangers : les albums sont des "objets-livres" élaborés qui allient qualité graphique et qualité du texte.

Par ailleurs, l'Agrume a à cœur de travailler avec de jeunes illustrateurs. Cette volonté est récompensée par le prix "Opera Prima" puisque c'est le caractère exceptionnel d'un premier album d'un jeune auteur qui est valorisé.

 

Quel impact ont ces mentions pour un petit éditeur comme l’Agrume ?

C'est assez difficile à dire : à chaque fois les mentions sont arrivées alors que le titre était sorti en France l'année précédente, qu'il avait déjà été présenté aux éditeurs étrangers sur plusieurs foires et qu'il était déjà vendu dans plusieurs langues. Cela n'a donc pas eu d'incidence directe sur les cessions de droits, mais par contre c'est une belle reconnaissance pour l'Agrume.