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L'édition de sciences humaines coréenne en mouvement

mars 2016

Par KIM Hak-won, Éditions Humanist.

Parmi les œuvres traduites publiées en Corée en 2014, on trouve 1 312 titres de sciences humaines, contre 2 598 titres de littérature et 1 716 titres de littérature jeunesse, ce qui place la thématique qui nous intéresse en troisième position pour le nombre de traductions.


D’après les chiffres de la KPIPA, 35 268 nouveaux titres ont été publiés au premier semestre 2015, soit 2,9% de plus qu’au premier semestre 2014. Parmi ces nouveautés, on compte 4 161 titres de sciences humaines* soit 3,1% de plus qu’au premier semestre 2014. Ils représentent 11,8% du marché, contre 28,8% pour les ouvrages éducatifs et manuels, 16,8% pour la littérature et 12% pour les sciences et techniques, ce qui les place dans le peloton de tête des domaines publiés.

 

Parmi ces nouveaux titres, on note une forte augmentation des ouvrages de sciences et techniques (+69,5%) et des ouvrages pour jeunes enfants (+20,8%), une faible hausse des ouvrages de sciences humaines (+3,1%) et d’art et culture  populaires (+2,2%), ainsi qu’une diminution des ouvrages de sciences sociales (-5,4%) et des ouvrages éducatifs du primaire et secondaire (-8,9%). Si l’on considère, dans la production coréenne, la littérature d’une part et les ouvrages de non-fiction d’autre part, on constate une baisse de la première catégorie et une augmentation de la seconde, à l’intérieur de laquelle ce sont les ouvrages de sciences et techniques (informatique, ingénierie, sciences, etc.) dont la publication s’est nettement renforcée, alors que les ouvrages de sciences sociales (politique, sociologie, économie, management, etc.), eux, enregistrent une baisse.

 

Les sciences humaines : en 3e position pour les ouvrages traduits en Corée

Parmi les 47 589 nouveaux titres publiés en 2014, 10 396 ont été traduits, ces traductions représentent 21,8% du marché, contre 31,8% en 2008.

En 2014, 641 titres on été traduits du français, ce qui place la France en 4e position derrière le Japon (3 725 titres), les États-Unis et le Royaume- Uni (3 031 titres). Parmi les œuvres traduites publiées en Corée en 2014, on trouve 1 312 titres de sciences humaines, contre 2 598 titres de littérature et 1 716 titres de littérature jeunesse, ce qui place la thématique qui nous intéresse ici en 3e position pour le nombre de traductions.

 

D’après les chiffres 2015 de Kyobo, la plus grande librairie de Corée, les ventes d’ouvrages de politique et sociologie sont en baisse de 1,9% ; celles des romans enregistrent leur plus forte baisse avec -8%. Pourtant, entre 2013 et 2015, les chiffres de ventes et d’affaires pour les sciences humaines n’ont cessé d’augmenter, entre 7% et 9% de plus. Ainsi, pour les ouvrages de psychologie, on passe d’une progression de +4,6% en 2014 à +48,5% en 2015.

 

Quelles sont les nouvelles tendances ?

Si l’on analyse l’évolution de l’édition de sciences humaines en Corée, on remarque qu’elle est liée à l’évolution de la société, des universités et des entreprises. Les lecteurs des années 1970, marqués par la colonisation japonaise et la guerre, se sont tournés vers la littérature et la philosophie. Dans les années 1980, parallèlement aux mouvements pour la démocratie, ce sont les sciences sociales qui étaient les plus lues. Si les lecteurs des années 1990 ont montré un intérêt pour la culture populaire et l’économie-management, ceux des années 2000, influencés par l’individualisme et le besoin de gérer leur stress, ont montré un nouvel engouement pour les ouvrages de psychologie.

On note également l’intérêt des lecteurs pour les ouvrages présentés sous forme de cours, dédiés aux non-spécialistes. Les ouvrages rédigés par des professeurs célèbres sont plébiscités tant à la télévision que sur Internet et les réseaux sociaux. C’est une tendance qui commence à se propager au-delà du domaine des sciences humaines.

 

L’augmentation du nombre de personnes vivant seules semble également avoir eu un impact sur le lectorat, autant pour les 20-40 ans que pour les 60-80 ans. Selon les chiffres 2014 du Bureau National des Statistiques, on comptait 9% de personnes vivant seules en 1990, contre 25,9% en 2013. On estime que chiffre va atteindre les 5 millions en 2015, soit un taux de plus de 30% de la population.

 

Pour un élargissement de l’édition en sciences humaines

La littérature et les sciences humaines sont les deux piliers de l’édition coréenne. Si l’on regarde les tendances récentes de l’édition en sciences humaines, elles montrent une atténuation de la distance et de la frontière entre l’auteur et ses lecteurs et une évolution de leur mode de communication.

À l’origine, les sciences humaines ne sont pas du texte mais du discours. La majorité des classiques asiatiques sont des passages à l’écrit de dialogues. Et c’est dans ce sens d’échanges basés sur le consensus que souhaite se diriger l’édition en sciences humaines. Elle veut faire face à son époque et se rapprocher au plus près des émotions de son lecteur à travers des sujets variés.

Les éditeurs coréens et français doivent suivre leur époque et ses changements afin de faire partager l’art et la philosophie aussi bien que la littérature. En avançant pas à pas, les éditeurs des deux pays pourront choisir, traduire et publier de bons ouvrages. Pourquoi ne pas essayer de mettre en place des projets communs comme des rencontres ou des lectures, en prenant en compte à la fois les ouvrages et ses différents acteurs : auteurs, traducteurs et lecteurs.

 

Ce que nous devrons faire aujourd’hui, c’est dépasser les idées "d’écriture et de traduction" pour nous diriger vers des objectifs plus larges "d’échanges et de partages".

 

* Il est à noter que les statistiques coréennes font apparaître séparément 3 873 titres de sciences sociales, (ndlr).


KIM Hak-won, Éditions Humanist, traduction Lucie Angheben

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