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Panorama du marché du livre en Corée

mars 2016

Par JOO Yeon-sun, EunHaeng NaMu Publishing.

Entre 2005 et 2014, l’édition coréenne a connu un taux de croissance annuel moyen avoisinant les 1,2% et depuis novembre 2014, le monde de l’édition a connu un grand changement avec une législation permettant aux éditeurs de fixer un prix unique du livre avec des possibilités de remises encadrées et ce quel que soit le genre du livre.


L'industrie de l’édition coréenne peut approximativement être divisée en trois secteurs : celui des livres, celui des manuels scolaires et celui des magazines.

D’après l’Agence Coréenne pour la Promotion de l’Industrie de l’Édition (KPIPA), le total des ventes de livres a atteint 1,3 billion de wons (970 millions d’euros), celui des manuels scolaires 2,7 billions (2 milliards d’euros) et celui des magazines 1,1 billion (820 millions d’euros) ; soit un total de 5,1 billions de wons (3,8 milliards d’euros). Les éditions Kyowon et WoongJin ThinkBig Co., Ltd, acteurs importants dans le domaine des manuels, figurent dans le classement des 50 plus grands groupes d’édition du monde, publié conjointement par Livres Hebdo et Publishers Weekly.

 

La Corée compte une dizaine de grandes maisons d’édition spécialisées dans les manuels scolaires, dont Daekyo, qui réalise un chiffre d’affaires de 750 milliards de wons (560 millions d’euros).

 

Entre 2005 et 2014, l’édition coréenne a connu un taux de croissance annuel moyen avoisinant les 1,2%, ce qui s’avère relativement faible par rapport aux autres domaines de l’industrie culturelle. Depuis novembre 2014, le monde de l’édition a connu un grand changement avec une législation permettant aux éditeurs de fixer un prix unique du livre avec des possibilités de remises encadrées et ce quel que soit le genre du livre.

 

Les librairies physiques, auparavant devancées par les librairies en ligne au niveau des réductions, ont rattrapé leur retard. Les ventes des quatre plus grandes librairies en ligne de Corée représenteraient aujourd’hui environ 50% des parts de marché.

 

La production

Lors du premier semestre 2015, on a publié en Corée 35 267 titres, soit une augmentation de 2,9% par rapport au premier semestre 2014.

D’après les statistiques de la KPIPA, le scolaire et le parascolaire arrivent en tête avec 10 141 titres, suivis par les sciences humaines et sociales et la littérature qui ont donné lieu respectivement à 8 034 et 5 700 titres. Ensuite, le secteur des sciences et techniques représente 4 245 titres, la jeunesse 3 580 titres, le pratique 2 332 titres et enfin 1 235 titres d’art et de culture populaire sont parus.

 

En 2014 en Corée, on dénombrait un total de 6 131 maisons d’édition ayant publié au moins un livre. 4 070 éditeurs ont publié moins de 5 livres (soit 66,4%) et seuls 1 244 éditeurs ont publié plus de dix livres (plus de 20%).

 

Le marché du livre numérique en Corée

Selon l’Association des éditeurs numériques de Corée, on estime le marché coréen de l’édition numérique à 706,3 milliards de wons (530 millions d’euros), contenus numériques, logiciels et matériels confondus. Les ventes de livres numériques par les éditeurs de livres papier traditionnels représenteraient environ 3% des ventes. La plus grande librairie de Corée, Kyobo, présente des chiffres similaires avec un pourcentage de ventes numériques de l’ordre de 3,5%. Malgré l’intérêt croissant de ces dernières années pour le numérique, ce secteur de l’édition semble stagner. Les causes peuvent être attribuées entre autres à la multiplication des supports, au manque de dynamisme des éditeurs en rapport avec le peu de ressources escomptées… Il n’y a que dans la littérature de genre (fantasy, aventure, romans d’amour, bande dessinée, webtoon, etc.) que les ventes en format numérique peuvent représenter plus de 60% du total.

 

Publication d’œuvres traduites

En 2014, parmi les nouveaux livres publiés, on recensait 10 396 titres d’œuvres traduites, soit 15,5% du total des publications (mais 22% hors scolaire et parascolaire). Parmi les 200 meilleures ventes de l’année de la librairie Kyobo, on compte 77 titres traduits.

Si l’on distingue les pays d’origine des publications, on constate que plus de 35% des ouvrages sont traduits du japonais (3 725 titres), suivi de l’anglo-américain (3 031 titres). Viennent ensuite les littératures britannique et française. En 2014, ce sont 641 ouvrages publiés en Corée qui ont été traduits du français, parmi lesquels 231 titres de littérature, 227 titres de jeunesse, catégories les plus représentées. On trouve aussi des auteurs français dans la liste des meilleures ventes de l’année 2015 de la libraire Kyobo : Central Park de Guillaume Musso et Le voyage d’Hector ou la recherche du bonheur de François Lelord. Les auteurs français actuellement les plus lus en Corée, excepté les deux auteurs cités précédemment, sont Saint-Exupéry, Émile Ajar, Albert Camus, Marcel Proust ou encore Bernard Werber.

 

- Traduit par Lucie Angheben

 

 

Les meilleures ventes 2015 en Corée

La réussite des ouvrages de sciences humaines et sociales contraste avec la faiblesse des ventes des romans coréens. Les romans adaptés au cinéma et les livres de coloriage tirent leur épingle du jeu.

Les lecteurs âgés entre 20 et 30 ans, devant faire face aux difficultés d’un quotidien rythmé par l’obsession de trouver un emploi, de la réussite et de la compétition, se tournent plutôt vers des ouvrages inspirés de la "psychologie individuelle" d’Adler, dont le plus éminent représentant est l’auteur japonais Ichiro Kishimi. Son livre Le courage d’être détesté a trôné en tête des ventes.

D’autres ouvrages de vulgarisation de sciences humaines comme Quelques bases pour une conversation intelligente, Leçons d’écriture ou Argumentation ont également eu un grand succès. Les programmes télévisés en lien avec les sciences humaines se sont multipliés, un bon moyen de promouvoir le domaine. Les deux volumes de Quelques bases pour une conversation intelligente ont la particularité d’avoir atteint le statut de meilleures ventes, en dépassant les auteurs les plus renommés et en se démarquant sur les podcasts pour smartphone.

 

Illustration d’un phénomène mondial, la Corée suit la tendance des "media-sellers" ou "screen- sellers", pour faire référence au succès des œuvres adaptées à la télévision ou sur grand écran. C’est ainsi que Le voyage d’Hector ou la recherche du bonheur et Seul sur mars se sont hissés en tête des ventes.

 

Un des phénomènes qu’il est impossible d’omettre, c’est l’engouement pour les livres de coloriage (380 titres publiés l’an dernier). Le meilleur exemple est Le jardin des secrets de Johanna Brasford, troisième du classement général et premier de sa catégorie, suivi du Jardin du temps et du Livre de coloriage d’art botanique, qui montrent que les auteurs coréens ont aussi eu un grand succès.

 

Dans le domaine du roman, Miracles au bazar de Namiya, de l’auteur japonais Keigo Higashino, s’est hissé à la quatrième position du classement général, premier de sa catégorie. Sur les 30 romans sélectionnés, on compte 24 œuvres étrangères pour 6 œuvres coréennes, qui ont peiné à s’affirmer. Parmi ces dernières, les deux romans de l’auteur Jang Kang-myeong, Parce que je déteste la Corée et Bataillon de commentaires, ainsi que des œuvres dont le succès reste constant, comme Les nuits de sept ans et Ma mémoire assassine. Du côté des romans étrangers, quinze titres proviennent du Royaume-Uni ou des États-Unis, cinq du Japon, deux de France, deux d’Allemagne et six d’autres pays d’Europe. Des nouveautés sont attendues cette année de la part des auteurs coréens au succès moyen, avec l’espoir qu’elles contribueront à faire sortir le roman coréen de cette spirale d’échec de 2015 et lui faire reprendre son rôle moteur sur le marché du livre.


JOO Yeon-sun, EunHaeng NaMu Publishing