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Portrait et entretien de professionnel

Sabine Wespieser : "Francfort reste un temps fort de l’année."

novembre 2009

[14-18 octobre 2010]
La Foire de Francfort reste le lieu d’échanges le plus agréable et le plus fructueux pour créer et maintenir un réseau international.

C’est vrai, presque tous ses rendez-vous cette année ont commencé par la question inquiète : « Et chez vous, la crise, c’est comment ? » mais, pour Sabine Wespieser, directrice de la maison du même nom, la Foire de Francfort se révèle de plus en plus fructueuse au fur et à mesure des années. « Cela fait 20 ans que j’y vais, successivement pour Actes Sud, Librio et, depuis 7 ans, pour la maison que j’ai créée : je n’ai jamais eu autant de rendez-vous ».
On ne peut donc parler de renversement de tendance, ni de mutation profonde de cette manifestation internationale, comme le suggère parfois le buzz médiatique. Un éditeur peut continuer d’y inscrire son travail dans la durée. « Cela signifie pour moi continuer une politique d’auteurs, aussi bien avec les auteurs français et francophones qu’avec les auteurs traduits de mon catalogue. »

Pour ce faire, Sabine Wespieser dit avoir appris à « affiner son emploi du temps », c’est-à-dire à avoir centré ses rencontres et ses échanges avec des homologues sur le marché européen, avec lesquels elle sait possible un intérêt réciproque.
« C’est pour avoir ces échanges que je vais à Francfort, il y a par ailleurs un responsable de droits dans la maison, qui assure le suivi au long de l’année. Cette activité est d’ailleurs assez récente pour nous, puisqu’elle a véritablement démarré en 2006 avec Le canapé rouge de Michel Lesbre, mon premier succès commercial en France, ce qu’on sait être un bon point de départ pour la vie d’un livre à l’étranger. »

Cette année, un des moments forts de cette convivialité professionnelle à Francfort fut, pour l’éditrice, la réunion, au cours d’un dîner, des six éditeurs étrangers de Nuala O’ Faolain, dont elle a traduit plusieurs ouvrages et qui lui avait confié, avant sa mort, la gestion de ses droits.

Si l’on sait que la plupart des contrats de cessions ou d’achats se concluent en amont ou en aval de la Foire de Francfort, à l’occasion d’un voyage, ou de la participation à une autre foire, ou par le biais d’un sub-agent, Sabine Wespieser pense que « beaucoup de choses se concrétisent à Francfort ». La foire allemande continue de jouer un rôle d’accélérateur du temps qui peut être déterminant pour un livre. « Un bon exemple est celui du livre de Catherine Mavrikakis, Le ciel de Bay City, que nous avons envoyé à certains de nos partenaires étrangers juste avant Francfort. Les droits en ont été achetés avant même la foire par un éditeur italien, un grec et un suédois, avec pour effet d’accroître l’intérêt lors de sa présentation à d’autres éditeurs étrangers. »
 
Francfort est aussi un lieu de convergence des informations, ce qui peut jouer là encore un rôle déterminant dans le choix d’un livre, surtout quand on hésite. « Un éditeur turc est venu me parler, avec conviction, d’un livre de 800 pages… Le hasard me fait rencontrer à la suite l’éditrice allemande de l’ouvrage, puis son éditrice grecque, toutes deux faisant partie pour moi de cette communauté d’éditeurs à laquelle je fais confiance pour mon catalogue, qui me parlent du livre avec enthousiasme. Et c’est là que je me décide à le lire en allemand… et à le publier en 2010. » Le bouche-à-oreille est important dans le grand brouhaha de Francfort.
« A un moment donné, ce qui compte, comme en librairie, c’est la personne qui vous parle d’un livre, qui vous amène à sa lecture. Où est alors cet "enfer de Francfort", comme le désignent certains ? »

Et le numérique dans tout ça, annoncé comme omniprésent lors de cette 61e édition ? « Ça ne me concerne pas trop, je fais confiance à mon diffuseur pour ces questions. Ça n’a rien changé à mon quotidien de Francfort, où je travaille toujours avec la matérialité de l’objet livre. » Si la foire fait écho à la concentration mondiale de l’édition et à l’explosion des nouvelles technologies, elle permet aussi de continuer à faire de la littérature avec d’autres maisons sœurs et « parfois même avec des bouts de ficelle… »

Propos recueillis par C.F

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