L'onde de choc est partie de New York. Elle a d'abord creusé
une faille gigantesque entre les Occidentaux et le reste du
monde. Puis les cassures se sont ramifiées, de part et d'autre de
l'Atlantique, entre les Européens, tout autour de la Méditerranée
et jusqu'en Russie.
Un an après le 11 septembre 2001, je me suis rendu sur les
lieux de ce tremblement de terre. J'y ai vu un paysage mental
dévasté, des gens qui vivent entre drôle de guerre, peur de la
violence et volonté de combattre. Surtout, au milieu des ruines
d'un monde qu'on nous promettait globalisé, ouvert et prospère
voilà encore cinq ans, j'ai observé l'émergence de curieux
mutants.
Ces gens qui disent défendre la démocratie et la liberté,
quitte à les mettre sous cloche, qui conjuguent sécurité et
optimisme pour eux, agressivité pour ceux qui les critiquent,
je les ai retrouvés à Londres et à Moscou.
Je les ai vus à l'oeuvre au moment des attentats qui
ensanglantaient les grandes métropoles. J'ai interrogé ces
responsables sur l'avenir qu'ils dessinent pour leurs concitoyens.
Et plus particulièrement sur les conséquences de
l'incompréhension générale entre les peuples qui s'est installée
à l'ombre de la mondialisation. J'ai cherché à repérer les
convergences et les chances de réconciliation.
Après deux ans d'investigations sur les traces de ces
démocraties génétiquement modifiées, j'ai au moins une
certitude : c'est maintenant qu'il faut en comprendre la formule
si nous voulons sauver la paix.